Rédiger un mémoire en 10 étapes

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A l’usage du pédagogue d’aujourd’hui et de demain

 

Préambule : 

Partez du principe que l’étudiant d’aujourd’hui manque systématiquement de temps, qu’il considère le travail à produire (mémoire ou thèse) comme un objet de forme parallélépipédique, comprenant si possible des images en couleur, muni d’une bibliographie, et bien relié. 

Son objectif est toujours d’obtenir une note correcte ; il est parfois de retenir des connaissances.

Essayez de suivre les étapes de son processus de création afin de l’aider.

 

Les 10 étapes du processus de réalisation des travaux d’étudiants

 

© Bergadaà, 2007

Etape 1 : Analyse du sujet

 

Etudiant

 

L’étudiant analyse les termes du sujet et vous demande des précisions quant au nombre de pages, la taille des caractères et le nombre de références bibliographiques requises.

 

 

Enseignant

 

Préciser votre projet pédagogique. Pourquoi demandez-vous un travail écrit au lieu d’un examen ? Quelles sont les qualités cognitives que vous souhaitez voir développées ? Quelles sont les aptitudes que l’étudiant doit mettre en exergue ? etc.

 

  •  Si vous ne le faites pas, l’étudiant comprendra que vous allez lire superficiellement son travail, donc qu’il pourra, au besoin, tricher.

 

Etape 2 : Wikipedia

 

Etudiant

L’étudiant décompose son sujet en mots clés. Le passage obligé de l’étudiant est de lire, voire recopier, tous textes de Wikipedia relatifs à ces mots clés.

 

 

Enseignant

Lisez avec attention toutes les pages de Wikipedia qui se réfèrent aux concepts de votre cours. D’une part, cela vous permet d’en parler en cours avec vos étudiants et d’autre part, cela peut vous donner envie d’enrichir Wikipedia de vos connaissances.


  •  Si vous ne le faites pas, l’étudiant, qui a oublié votre cours, prendra pour vérité absolue et sacrée Wikipedia sans comprendre que cette encyclopédie est faite par des gens comme vous et moi.

 

Etape 3 : La consultation des mémoires et thèse
Etudiant

 

L’étudiant commence toujours par vérifier s’il existe des mémoires ou thèses déjà produits par des étudiants afin de s’en inspirer.

Par chance pour lui, de nombreuses universités mettent ces documents en ligne et le choix des sujets finissant par être limité, la pêche est rarement bredouille. La lecture rapide de ces travaux lui permet d’établir sa table des matières.

 

 

 
Enseignant

Annoncez clairement à vos étudiants que vous utilisez un logiciel de détecteur de plagiat. Sinon, avouez que c’est vraiment tenter le diable que de proposer des sujets similaires à ceux de vos collègues d’autres universités. Et d’ailleurs, pourquoi seraient-ils différents, ces sujets, si vous enseignez la même matière ?

  •  Si vous n’utilisez pas de logiciel de détection de plagiat, il vous faudra lire avec une mentalité de douanier les travaux de vos étudiants. C’est fastidieux et attristant.

Etape 4 : le prête-à-déposer
Etudiant

Si l’étudiant porte un certain intérêt à votre matière, il passera directement à l’étape 5

Si l’étudiant n’a aucun intérêt dans votre matière, il pourra soit acheter un travail tout fait à un des sites les plus connus, soit payer des spécialistes afin qu’on lui fasse son travail.

 

Dans ces deux modèles économiques, il lui sera garanti que les travaux ne sont pas plagiés, donc qu’il ne risque rien.

 

 

 

Enseignant

Si vous avez la chance d’avoir de bons assistants, ou si vous-même avez le temps de recevoir en privé les étudiants en cours de travail, alors modifiez autant que possible leur table des matières et introduisez de nouvelles exigences.

  •  Si vous ne pouvez pas accompagner les étudiants pendant leur réalisation de ces travaux, alors revenez à une évaluation des connaissances de type examen sans documents.

 

 

Etape 5 : Le garnissage de la table des matières
Etudiant

L’étudiant va naviguer en toute liberté sur la toile en copiant ci et là des paragraphes qui lui servent à garnir sa table des manières.

Peu à peu le nombre de pages augmente jusqu’à atteindre 10 à 20 % de plus que le nombre de pages visées. A ce stade, le jeu de Lego est terminé et le gros de la construction achevée.

 

 

Enseignant

A ce stade vous ne pouvez guère intervenir, si ce n’est en proposant un modèle de création par schéma heuristique à l’aide d’un logiciel de type « Mind-manager ». Mais ceci implique que vous ayez consacré une séance de cours à faire découvrir à vos étudiants la manière d’élaborer une connaissance sur la base de concepts connectés. De tels schémas heuristiques reproduisent exactement le système en réseau des concepts de la toile.

  •  Si vous n’avez pas peur, inspirez-vous de la proposition d’un collègue pour apprendre aux étudiants ce qu’est une source valide et une proposition fiable. Rendez-les critiques face au Web.

 

Etape 6 : La bibliothèque
Etudiant

La bibliothèque, c’est avant tout un endroit au chaud où l’on peut naviguer tranquillement sur la toile.

Si la bibliothèque de votre établissement ne propose pas les sources documentaires et les revues en ligne, il y a bien peu de chances que l’étudiant prenne la peine de lire les originaux des articles qu’il citera. Il y a tellement de documents sur le web qui se terminent par des bibliographies qu’il suffit de copier-coller !

 

 


Enseignant

Si vous avez la chance d’avoir un bon service de bibliothèque, sans doute a-t-on prévu des séances obligatoires de formation des étudiants à la recherche documentaire à la consultation des revues en ligne, à l’art de la citation ? Si un cours obligatoire de cette nature n’existe pas encore, exigez-le.

 

  •  Participez au développement des bibliothèques de votre établissement pour aider leurs responsables à muter, avec vous, vers ce siècle Web.
Etape 7 : Le lifting
Etudiant

Si l’étudiant pense que son professeur lit méticuleusement les travaux il passera directement à l’étape 8.

Mais, il est possible à cette étape que l’étudiant soit presque certain que son professeur ne fera pas de contrôle du plagiat.

Pourquoi, dès lors réécrire des phrases si bien élaborées par d’autres ? 

Dans ce cas, il s’attachera à uniformiser la taille des caractères et la présentation générale, il écrira des phrases de transition entre paragraphes, réécrira quelques passages ne lui convenant pas. Il n’oubliera pas la page des remerciements, le lisage de la bibliographie et rendra son travail, convaincu d’avoir été un très bon synthétiseur.

 

Enseignant

Annoncez clairement les différences entre plagiat, triche et fraude. Rappeler nos valeurs de création et de diffusion de connaissances afin d’affirmer l’égalité des chances et le mérite individuel. Renforcer la croyance en son instrument, la norme d’évaluation des connaissances acquises, en insistant sur un traitement d’équité.

 

  •  Dites que vous êtes en mesure de conduire tout « plagieur » devant la réglementation afin que la faute soit justement et sévèrement punie.
Etape 8 : La personnalisation
Etudiant

Si l’étudiant pense que son professeur peut contrôler du plagiat, ou qu’il aime faire un travail plus personnel, ou qu’il est trop fier pour copier, il personnalisera son travail.

 

Il s’attachera à réécrire les morceaux de textes qu’il a précédemment relevés. Il chercher les articulations, et modifiera éventuellement son premier plan. Son style sera, c’est évident, la langue du Web. 

 

Enseignant

Partez du principe que personne, avant vous, n’a expliqué aux étudiants l’usage des quatre opérations de l’écriture : classer (préciser l’ordre et établir des parallèles), opposer (pour contredire ou rectifier une idée), lier (par des causes ou par des conséquences), développer (introduire, renchérir, atténuer, conclure). 

  •  Ecrivez une note pédagogique de vos attentes en termes de style du travail. C’est d’autant plus utile que vous avez des étudiants de multiples origines culturelles ou disciplinaires.

 

Etape 9 : L'esthétique du document 
Etudiant

Depuis un certain temps déjà, la forme compte beaucoup plus que le fond, la marque plus que le produit. L’étudiant conçoit un beau travail comme un texte dont le design implique des paragraphes qui ont la même taille. Et cette taille c’est exactement celle d’une page-écran, soit 12 à 15 cm de hauteur.

Il va donc couper les paragraphes trop longs et délayer ceux qui lui semblent trop brefs pour obtenir un « document zen ».

 


Enseignant

Annoncez clairement qu’il convient de distinguer, dans le travail, l’important de l’accessoire afin de leur accorder un espace différent.  Rappelez que la forme est au service du fond, simple média relationnel entre l’étudiant et le professeur.

 

  • Habituez-vous au format taille écran en lisant de plus en plus de textes possibles sur votre PC. Écologiquement, c’est utile puisque cela évite le gâchis de papier des travaux à peine notés aussitôt jetés.

Etape 10 : La remise du travail
Etudiant

Si possible, l’étudiant remettra son travail sous forme papier, car il sait bien qu’un document rendu électroniquement peut être contrôlé.


Or, il est quasiment impossible que le document final soit vierge de tout plagiat, étant donné le mode de réalisation de l’ouvrage.

 

  

Enseignant

N’oubliez pas que les étudiants ont droit à un feed-back de leur travail. C’est ce qui leur fait comprendre que l’exercice pédagogique n’est pas de leur mettre une note de réussite ou échec, mais bien de les former au plan cognitif. Et les étudiants se parlent entre eux, d’un cours à l’autre…

  •  Exigez le travail sous forme électronique. D'une part, vous pourrez contrôler le plagiat et, d’autre part, vous pourrez écrire vos commentaires directement sur le texte